Voir Dieu tel qu’Il est
Disciple de saint Silouane l’Athonite, l’archimandrite Sophrony (1896-1993) a été tour à tour moine, ermite et père spirituel de plusieurs monastères, dont celui qu’il a fondé en Grande-Bretagne. « Voir Dieu tel qu’Il est », publié ici pour la première fois dans sa version définitive et intégrale, est son autobiographie spirituelle : « Mémoires intérieurs » qui suivent non pas une logique événementielle, mais qui nous plongent au cœur de son expérience du mystère de Dieu. Une expérience paradoxale, marquée par la plongée de l’âme dans les gouffres, du néant et la révélation bouleversante de l’Être absolu comme personne : « Je suis Celui Qui Suis » (Ex 3, 14). Créé à l’image de Dieu, l’être humain est appelé à la déification et à la vision de la Lumière incréée. D’individu centré sur lui-même, il doit devenir une personne : un être en communion avec la Sainte Trinité et avec son prochain, capable de porter dans son cœur l’humanité entière et de compatir à ses souffrances. Le père Sophrony, à partir de sa propre expérience, nous décrit la voie qui mène à la réalisation de cette vocation originelle. Un chemin paradoxal en trois mouvements : don gratuit de la grâce, souffrance de l’abandon de Dieu et recouvrement de la grâce par le combat ascétique et la prière. La purification du cœur s’obtient par l’humilité et par les larmes du repentir. Cette spiritualité exigeante, incandescente, nous rappelle qu’il n’y a pas de résurrection en Christ sans crucifixion du vieil homme. C’est par la Croix, la traversée des ténèbres de son propre enfer intérieur, que le chrétien accède à la Lumière du royaume des cieux. C’est en se voyant soi-même tel qu’il est – dans sa faiblesse et captif de ses passions – qu’il peut voir Dieu tel qu’Il est, s’unir à Lui, accéder à la joie infinie et à la vraie liberté.
Le père Sophrony le démontre magistralement : la théologie n’est pas un exercice spéculatif, mais « l’état de l’être inspiré par la grâce divine » ; la connaissance spirituelle n’est pas un savoir, mais « l’expérience, dans l’existence, de la communion avec Dieu » ; le « christianisme n’est pas une doctrine, mais la vie ». Et le contenu de cette vie, plus forte que la mort, c’est l’amour.